jeudi 12 mars 2015

L’érable; gastronomie et plaisir

Photo : Érablière, Tourisme Trois-Rivières


Il y a un je-ne-sais-quoi dans l’air. Le gazouillis des oiseaux commence et la chaleur se dévoile peu à peu. C’est à tout le moins un début. Ce qu’il y a dans l’air semble aussi être la part des anges, telle la vapeur de la distillation du scotch s’envolant dans le ciel de l’Écosse. Les anges écossais s’enivrent de la vapeur des éthers, les nôtres se délectent de celle des érablières au printemps. Nos corps et nos esprits engourdis par la sédentarité dégèlent au rythme de la nature. La fièvre printanière  monte en nous comme la sève coulant dans les arbres, lentement. L’eau d’érable coulera en abondance dit-on. L’hiver a été rude et les acériculteurs semblent optimistes. Le bouillonnement dans les cuves des érablières nous appellent comme une ode à la joie et au temps doux. À la gourmandise aussi. Je répondrai à l’appel de multiples façons.

De plus en plus, l’identité culinaire québécoise balance entre modernité et tradition. J’ai abordé ce sujet au mois de décembre dans une chronique portant sur un Noël. Dans la même suite d’idées, je trouve deux aspects de la cabane à sucre intéressants. Ce qui se place comme étant une tendance urbaine actuelle, la cabane à sucre gastronomique se développe, surtout à Montréal. Il y a que la perspective d’un tel repas traditionnel, mais de façon plus travaillée et avec plus de finesse, donne du renouveau à l’expérience vécue. Surtout en considérant la plus courte distance à parcourir pour manger un des repas les plus appréciés de la saison. La cabane à sucre du Vieux-Port de Montréal au Scena demeure un incontournable au rythme du violon et d'un dj. Laurent Godbout, chef-propriétaire de Chez l’Épicier sera le chef attitré. Ce grand chef montréalais fût le premier québécois à participer aux olympiades de la cuisine cette année au Bocuse d’Or, à Lyon, en représentant le Canada. Il s’agit de la plus haute compétition culinaire au monde, exigeant des mois de préparation.

Certains chanceux iront à la cabane à sucre Au Pied de Cochon. Celle-ci  ne se trouve pas en ville, plutôt en campagne. Très gastronomique et avec un menu de classiques revisités avec des produits nobles tels que le foie gras.

Photo : Martin Picard, chef de la cabane à sucre Au Pied de Cochon, source Télé Québec


Il y a aussi l’option de la cabane à sucre traditionnelle. Aller en nature, déguster un repas plus rustique à l’établissement de votre choix. Entre amis et en famille, c’est vraiment agréable. Il y a l’ambiance aussi. Ceux qui veulent l’ultime expérience et un dépaysement, il y a le Festival beauceron de l’érable. Situé surtout à Saint-Georges, du 22 au 29 mars, la Beauce vous convie dans ses splendeurs rurales afin de festoyer autour de notre produit national. C’est avec fierté que la Beauce peut se targuer de produire des gammes variées de l’érable de haute qualité. Théâtre, amuseurs publics, spectacles de musique, animaux et bien plus seront au rendez-vous.

Ma collaboration avec Le Bièrologue continue depuis ma chronique de novembre. C’est dans cette boutique d’épicerie fine et de microbrasserie que j’avais fait une entrevue sur l’endroit, la bière et le terroir. Ce mois-ci, je suis allé voir ce que le monde brassicole avait à offrir avec ses brassins au sirop d’érable. David, le propriétaire, m’explique que la bière n’est pas elle-même brassée avec le nectar sucré de l’érable. Il s’agit plutôt d’un style, par exemple une double, auquel du sirop a été ajouté. Ça donne du cachet à certains produits, selon leur méthode de brassage. David suggère des sucreries de l’érable, des vinaigres du même produit et trois bières de choix. Les voici.

  •  La british à l’érable, À la Fût, Coop de travail de St-Tite, bière brune aux noix à l’érable
  •  Tord-vis, les brasseurs RJ, bière forte à l’érable sur lies
  •  La Suzanne Marceau, Microbrasserie de l’Île d’Orléans, ambrée au sirop d’érable de l’Île


Il y a de fortes chances que vous puissiez les trouver à votre boutique de microbrasserie préférée. 

Sélection de bières chez Le Bièrologue, photo de Rémy M. Gagnon


Pour leur part, Première Moisson ont lancé une ligne de produits autour de l’érable. La boulangerie nous offre un chausson géant de pâte viennoise au cœur rempli de crémeux à l’érable, parsemé de pépites d’érable et de pacanes. La pâtisserie nous délecte avec ses croissants fourrés à la crème et sirop d’érable, trempés dans la même sucrerie. Décadent. On y trouve de plus les dômes chocolatés et les tartes, des financiers, toujours à la même saveur. J’ai su que le producteur du sirop utilisé chez votre succursale Première Moisson la plus proche se trouve à être le maître-charcutier de la maison, Jean-Marie Esnault. Son érablière, située à Saint-Joachim-de-Shefford, se nomme Légende de Nokomis, telle la merveilleuse histoire amérindienne du même nom. La charcuterie qu’il a créé aux saveurs sucrées-salées se compose de porc, de pacanes et d’une mousseline de porc à l’érable. Ça promet.

Photo: Première Moisson


Voilà plusieurs manières de profiter du temps des sucres en temps différents. Je me réjouis d’avance du plaisir que je connaîtrai à profiter de la saison du renouveau. Les balades dans l’air se réchauffant vivifient. Particulièrement celles faites à la campagne lors d’une visite à une cabane à sucre, le ventre excessivement plein et l’esprit léger. Le parfum de boisés en dégel offre une perspective intéressante de l’expérience, surtout quand on est bien accompagné. Le parfait bonheur!

Rémy M. Gagnon